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Comment se déroulent les élections à la Présidence de la Fédération Française d'Escrime ?

Un entretien avec le Maître Gérard Delavaquerie , Trésorier de l'Académie d'Armes de France.

Interview réalisée par Joël Girod le 21 octobre 2020 - les intertitres sont de la rédaction.



AAF : Tout d’abord, un grand merci à vous, Gérard Delavaquerie, pour cette nouvelle interview de la Revue de l’Académie d’Armes de France.

GD : Mais c’est un plaisir. Alors ? Que désirez-vous savoir ?

AAF : Nous aimerions, que vous nous apportiez un éclairage sur les modalités de l’élection du Comité Directeur de la Fédération Française d'Escrime (FFE) ainsi que le rôle de celui-ci.

GD : Allons-y !


Qui vote ?


AAF : La première question qui nous vient naturellement est la suivante : quel est le corps électoral qui vote pour déterminer les membres du Comité Directeur ?

GD : Historiquement, c’était le vote des délégués de Ligue, élus dans chaque Ligue, qui permettait de déterminer le Comité et le Président. Désormais, ce sont les Présidents des Clubs qui constituent le corps électoral.


Le Comité Directeur


AAF : Comment s’est déroulé le vote en 2020 ?

GD : En 2020, la Fédération a présenté 2 listes. La liste de Bruno Gares et la liste d’Isabelle Lamour. Cela s’est terminé à 55,32% pour Bruno Gares et 44,68% pour Isabelle Lamour.

Le nombre de candidats sur chaque liste était de 31. En effet, il y a 33 membres à pourvoir dans l’absolu dans le Comité Directeur mais deux sièges iront aux « personnes qualifiées ».

AAF : Qui est élu au Comité Directeur ? La liste gagnante et tous ses membres ?

GD : Eh bien, c’est plus subtil. Cela résulte de la proportion entre les candidats telle qu’elle résulte du vote.

La liste qui est arrivée en tête est assurée de disposer d’office de 18 sièges au Comité Directeur. Donc, Bruno Gares, avec ses plus de 55% lors de l’élection, a nécessairement les 18 premiers membres de sa liste qui vont siéger au Comité Directeur.

AAF : Le reste des sièges est donc soumis à la répartition proportionnelle si nous comprenons bien ?

GD : C’est cela, Cela fonctionne comme une pure proportionnelle.

Prenons un exemple chiffré.

On dira qu’il y a 18 élus d’office dans la liste du vainqueur.

Il reste maintenant à régler la question des 13 postes qui doivent encore être attribués.

Ils sont attribués proportionnellement aux pourcentages obtenus par chaque liste.

Ce sont les premiers inscrits sur la liste d’Isabelle Lamour qui seront retenus pour occuper un siège. Ils constitueront donc le groupe d’opposition au sein du Comité Directeur.

AAF : Certains doivent donc négocier lors de la phase des élections afin d’être placés au plus près de la tête de liste ?

GD : Oui, pour être en tête … ou à la fin. Certains peuvent souhaiter soutenir sans chercher à être élus. J’ai connu un candidat qui voulait bien s’engager, mais ne pas être élu. Il voulait de ce fait rester en fin de liste afin de ne pas être retenu comme membre du Comité Directeur, quel que soit le résultat.

AAF : Donc, selon ce mode électoral, sauf élection d’un candidat à 100% des voix, ce qui est très improbable, les candidats en fin de listes n’ont aucune chance d’être membres du Comité Directeur.

GD : Exactement. C’est la même chose que lors des élections municipales.

Isabelle Lamour devait donc nécessairement intégrer le nouveau Comité Directeur étant première de liste. Mais elle a visiblement adopté un autre choix personnel.

Sont bien élus en revanche des inscrits de la liste d’Isabelle Lamour. C’est le cas de Michel Carliez, qui est bien connu de l’AAF. Michel Carliez est le 29ème membre du nouveau Comité Directeur. Et Rémy Delhomme, pour illustrer mon propos, est le dernier à être pris au Comité tout en étant issu de la liste d’Isabelle Lamour. Il figure donc en place 31.


Les personnes qualifiées


AAF : On compte donc 31 élus issus des listes sur les 33 postes à pourvoir. A quoi correspondent les 2 postes vacants ?

GD : Une fois que ce comité est formé, il y a, en plus des 31 membres dont on vient de parler, 2 « personnes qualifiées » qui n’ont rien à voir avec les listes mais qui sont néanmoins élues en même temps que le Comité Directeur. Aujourd’hui, les 2 personnes qualifiées sont Jean-Jacques Bena et Laura Flessel. Je les cite en fonction de l’importance des suffrages exprimés. On avait au total 6 personnes qui se présentaient afin d’être élues « personne qualifiée ».

AAF : Objectivement, ces personnes qualifiées sont tout de même nécessairement d’une certaine sensibilité par rapport au Président de la FFE ?

GD : Pas forcément.

En général il s’agit de gens hors listes. Ils ont surtout une aura forte au sein de l’escrime et en sont représentatifs, comme Laura Flessel typiquement. C’est vrai qu’elle était proche de Bruno Gares durant la campagne. Mais c’est plus ce qu’elle représente qui compte, dès lors qu’elle est personne qualifiée.

Un ancien ministre, quelqu’un de connu dans l’escrime et au-delà, ou toute personne qui peut intervenir avec une forme de neutralité, a vocation à être une personne dite qualifiée.

AAF : Quel rôle jouent ces personnes qualifiées au sein du Comité Directeur ?

GD : Ah, ils ont totalement les mêmes prérogatives qu’un autre membre du Comité. Ils votent et participent aux délibérations, sur tous les sujets qui relèvent de la compétence du Comité Directeur.


Le Bureau


AAF : Et ensuite, que se passe-t-il ?

GD : Eh bien ensuite, le Président forme son bureau.

AAF : Justement, le Président est-il élu par le Comité ou le bureau qu’il constitue, comme le serait un maire qui est élu par le conseil municipal ?

GD : Non. Le Président est élu dans la mesure où en tant que tête de liste, il est candidat à la présidence.

Si sa liste l’emporte, il est président. On entérine simplement ce qui est un fait acquis.

C’est à lui ensuite, avec les gens qui ont été élus au Comité, de former son bureau : vice-président(s), trésorier, secrétaire …

Mais qu’on soit clair. Ces postes clés sont déjà anticipés durant la campagne. Le candidat tête de liste sait qui il envisage à telle ou telle fonction en cas de victoire.

Le candidat à la présidence place donc dans sa liste, à des postes nécessairement éligibles s’il l’emporte, ceux qui constitueront son « gouvernement » durant la mandature. Il choisit ici des personnalités qui sont en rapport, de par leur expérience, aux fonctions qu’il veut leur voir exercer à ses côtés pendant 4 ans.

Mettre un spécialiste comme secrétaire ou trésorier est un choix cohérent, vue la nature de la fonction qui lui sera confiée.

Durant la dernière mandature, par exemple, Serge Aubailly a été Secrétaire Général de la FFE. C’est un expert-comptable qui a des fonctions au sein de son Ordre. Ce choix opéré par l’ancienne Présidente était donc logique.

Le Président aura aussi été vigilant au moment de la constitution de sa liste au respect de la représentation territoriale. Il n’est pas question de faire figurer sur sa liste électorale uniquement des parisiens. Il faut garantir la représentativité régionale, en ce compris l’Outre-Mer.

AAF : Comment fonctionne le bureau issu du Comité Directeur ? Étant bien précisé qu’on a compris que seront désignés aux postes clés les premiers de la liste gagnante.

GD : Il y a tout d’abord constitution officielle du bureau. On peut ici tout imaginer. Le Président peut décider de nommer plusieurs Vice-présidents avec des délégations précises : un sera à la communication, un autre sera chargé de la vie sportive, un troisième sera à l’informatique et aux nouvelles technologies, ou encore on en trouvera un en charge de l’emploi, ou un vice-président responsable de la formation. Là, c’est la liberté présidentielle.


Les commissions


GD : Indépendamment de cela, il y a des commissions. Quand j’étais moi-même au Comité Directeur, le Président choisissait en son sein une dizaine de membres et les chargeait de constituer telle ou telle commission. Pour ma part, Frédéric Pietruszka m’avait chargé de la Commission Escrime Artistique. Les membres de la commission ne font pas nécessairement partie du Comité Directeur. Rien n’empêche le Président de la Fédération d’accepter qu’une personne qui l’a soutenu durant sa campagne, soit Chargée de Mission au sein d’une Commission. Même si elle n’est pas élue au sein du Comité Directeur.  Rien n’empêche non plus au Président de dire à un membre de l’opposition au sein du Comité Directeur « tu prends telle commission et tu me proposes ceux que tu veux voir siéger dans cette commission ». Bon, soyons en même temps réalistes, les directions des commissions stratégiques, comme celles qui touchent au budget, ne seront jamais attribuées par aucun Président de la FFE à un membre de son opposition. Ce serait pour le moins saugrenu.


Précisons qu’il peut y avoir également des membres du Comité Directeur qui soient Vice-présidents et Chargés de Mission. Ceux-là rapportent directement au Président.

AAF : Quel est le poids des Commissions ? GD : Les Commissions contribuent au développement fédéral dans le cadre des missions qui leur sont confiées. Elles gèrent leurs missions en relation avec un représentant du Comité Directeur. Leurs travaux et leurs propositions sont remontées au Comité Directeur et au Bureau pour validation. 


La direction


Le Comité vient entériner les choix du Président et de son équipe rapprochée.

Il y a toutefois une exception à cette règle. Il s’agit de celle qui entre en jeu pour les décisions qui relèvent du pouvoir exclusif du Comité Directeur. Par exemple, pour une décision importante mais qui est sans incidence budgétaire telle que la détermination de la ville qui va organiser les Championnats de France. Il y a une enveloppe fédérale qui est définie pour être attribuée à cette compétition de toute façon. Le rôle du Comité Directeur se borne à décider quelle ville sera chargée d’accueillir les championnats. Le Président peut préférer une autre ville que celle déterminée lors du vote des membres du Comité Directeur. Pour autant, c’est le vote majoritaire du Comité qui l’emportera et non la préférence du Président. Ce qui touche aux questions de détermination des choix budgétaires et d’enveloppes financières à allouer en revanche doivent demeurer à la main du Bureau qui, en définitive, est amené à rendre des comptes au Ministère qui alloue une subvention significative à notre Fédération. Il est donc logique que le Bureau qui est impliqué par rapport aux subventions d’État garde la maîtrise de la redistribution de l’argent public.


Les cadres de la FFE


AAF : Peut-on dire ici un mot des représentants de la FFE en région ? Ils participent de l’application de la politique de la FFE sur le territoire, n’est-ce-pas ?

GD : Tout à fait ! Il y a une cinquantaine de postes de cadres fédéraux à la FFE.

Notons qu’un cadre fédéral comme le DTN (Directeur Technique National) compte pour 2 postes.

En ce qui concerne les cadres techniques fédéraux au plan national, ils ont le statut de fonctionnaires payés par l’Etat, mis à la disposition de la FFE. Du moins, c’est le cas pour l’instant. 

Il faut aussi bien noter qu’il y a également les cadres techniques régionaux, anciens CTR devenus CTS (conseillers techniques sportifs régionaux), et en parallèle des ATR (assistants techniques régionaux). Ils entrent à ce jour dans un budget ministériel.

AAF : Il y a aussi des salariés à la FFE ?

GD : Oui, bien sûr. Il y a les employés permanents de la FFE qu’on ne doit surtout pas oublier : les secrétaires, le comptable, le responsable des licences ... Généralement, quels que soient les changements de Présidents, ils assurent la continuité des affaires courantes de la FFE. Le trésorier et ses adjoints avec les 2 commissaires aux comptes assurent le contrôle de ces permanents.


Conclusion


AAF : Un dernier mot de conclusion ?

GD : La direction de la FFE doit s’entendre de façon globale, depuis le Président, le bureau et le Comité Directeur, jusqu’aux collaborateurs permanents qui échangent au quotidien avec les clubs français, en passant par l’ensemble des cadres et assistants techniques fédéraux présents dans nos régions.

La FFE est une organisation globale, indispensable au bon fonctionnement de l’escrime française.

L’AAF continuera naturellement à travailler main dans la main avec la Fédération et nous serons ravis de multiplier les occasions d’échanges avec la nouvelle équipe en place.



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